Faut-il croire en la startup Emmanuel Macron ?
Un an. C’est le temps qu’il aura fallu à l’entreprise politique d’Emmanuel Macron pour atteindre les plus hautes marches du pouvoir. En douze mois à peine, la startup En Marche est en passe de le propulser à la présidence de la république française. Mais cette progression éclair est-elle un mirage ? Ou un réel espoir pour l’avenir ? Derrière la façade positive, la success story pose de nombreuses interrogations.
Une ascension fulgurante
A 39 ans, le novice Emmanuel Macron est aux marches de l’Elysée. Au lendemain du premier tour, les sondages laissent entrevoir un boulevard pour le 7 mai. Jamais nous n’aurons eu un président aussi jeune. Jeune par les ans et par l’expérience des affaires publiques. Jamais élu, il évolue néanmoins dans les cabinets de François Hollande avant d’être nommé ministre de l’Economie de 2014 à 2016. Il quitte alors le poste pour fonder En Marche en avril 2016. Son entreprise politique reçoit vite des soutiens de poids, ce qui lui permet de mener une campagne séduisante auprès des médias et d’un jeune public.
En Marche, une startup innovante ?
L’homme au physique télévisuel se pose comme un novateur. Au-delà des clivages, Emmanuel Macron souhaite le rassemblement et oublier le sempiternel fossé gauche/droite. Un discours déjà entendu depuis de nombreuses années. François Bayrou, un de ses principaux soutiens, avait créé le Modem dans le même esprit. Dans un souci d’ouverture, il désirait rallier personnalités publiques de tout bord. Fondé en 2007, le Modem est en quelque sorte un En Marche arrivé 10 ans trop tôt. Ou mal incarné, ou peut-être les deux.
A part le célèbre centriste béarnais, les soutiens sont nombreux. Beaucoup sont membres ou très proche de l’actuel gouvernement au pouvoir. C’est le cas de Jean-Yves Le Drian, Thierry Braillard, Barbara Pompili, Bernard Poignant, Bertrand Delanoë… Pour le sang neuf, on repassera. Pire, beaucoup considère qu’Emmanuel Macron est tout simplement le fils spirituel de François Hollande. Dès 2012, il est ainsi présenté comme l’homme qui murmure à l’oreille du président. De plus, un autre ancien conseiller de Hollande, Aquillino Morelle, l’affirme également sur France Info en février dernier. Enfin, plus loin dans le raisonnement, Marianne, le magazine proche des couleurs socialistes publiait un édito : « Macron c’est Hollande candidat ».
Un concept bien marketé
Pour qualifier une startup, on retient généralement deux critères : l’aspect innovant et l’effet de masse sur la population. Le nombre de votes permet de valider le second critère sans problème. En revanche, pour l’innovation, c’est un autre débat. Une analyse pointue laisse une certaine amertume, voire un sentiment de tromperie. Un président impopulaire, pousse son jeune poulain, dont la vision politique est identique à la sienne. Cependant, les électeurs en ont-ils vraiment conscience ?
Les soutiens de Macron sont issus du sérail politique, économique et financier. Depuis des années, des décennies. Alors si l’innovation n’est pas dans l’idée d’ouverture (cf. Modem), où est-elle ? Faire passer un concept comme nouveau avec des ingrédients anciens, les as du marketing savent bien le faire. Prenez une tête de gondole au sourire Ultrabrite, de l’enthousiasme, de l’envie, il n’en faut pas plus pour convaincre. Juste la sensation de nouveauté. En ce sens, En Marche serait un Airbnb politique. Une idée réinterprétée avec brio.
https://www.youtube.com/watch?v=rfuwy1jiJEQ
Emmanuel Macron ou la licorne politique
Toujours est-il que le destin présidentiel tend les bras à Emmanuel Macron. En effet, en un temps record, la petite entreprise aura brûlé toutes les étapes. Quatre à quatre les marches du pouvoir sont gravies avec un score qui s’annonce impressionnant. Le vote de 18.21% des inscrits sur les listes électorales s’est porté sur la fraîche startup. Et au second tour, nul doute que l’action de la société va artificiellement gonfler. Car l’opposition à Marine Le Pen ne laisse pas un grand suspens sur l’issue du scrutin. Par conséquent, le fort score attendu gonflera un peu plus la bulle médiatico-politique dont bénéficie l’ancien ministre de l’économie.
Hier soir, Emmanuel Macron a appelé les électeurs à s’orienter vers lui au second tour dans un vote d’adhésion. Néanmoins, comme trop souvent depuis 2002, il s’agira pour beaucoup d’un énième vote de rejet. Une grande partie du pays choisira ce qu’il estime être le moins pire. Le futur président sera donc dans une position délicate : obligé de composer entre les espoirs générés auprès de ses convaincus, et le scepticisme des électeurs pragmatiques du 07/05/2017. Espérons toutefois qu’il ne soit pas comme son prédécesseur et « père spirituel », un excellent candidat mais un piètre gouvernant engoncé sous le poids du consensus.
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