Lieu Unique et ligne hétéroclite
A Nantes, le Lieu Unique met à l’honneur l’expression artistique primaire : le dessin. Au travers d’une exposition intitulée « Fragments de l’inachevé », on peut y admirer jusqu’au 9 novembre, des talents qui démontrent que cette pratique première a encore de beaux jours devant elle.
Quand j’ai dit que je me rendais à Nantes, on m’a immédiatement répondu : « tu vas manger des petits beurres ! ». En effet, il n’y a pas plus lié à l’image de cette ville que le célèbre rectangle doré. Ce que je ne savais pas, c’est que l’ancienne usine de biscuits est devenue un centre culturel. Les initiales LU (pour Lefèvre-Utile) signifient désormais Lieu Unique, un bouillonnant point de rencontre et de mélange. Théâtre, danse, concerts, expositions s’y déroulent tout au long de l’année dans un bâtiment qui abrite également un bar, un restaurant, une librairie, une boutique, un hammam et une crèche. Le genre de spot qu’on rêverait tous d’avoir près de chez soi !
Après la phase de découverte, je gravis l’escalier pour pénétrer dans l’espace investi par l’exposition « Fragments de l’inachevé ». Première surprise, l’accueil est fort agréable, assuré par un médiateur exerçant sa tâche au mieux. En introduisant le contexte d’une part, puis en répondant aux questions sur un sujet qu’il maîtrise sur le bout des doigts. Une véritable médiation, bien loin de certains plantons qui se cachent derrière leur écran d’ordinateur pour tuer le temps.
Je me vois alors expliqué que l’exposition vient de Lausanne où elle se tint dans un hangar de locomotives abandonné, voué à destruction pour ériger un musée des beaux-arts. Contre cette volonté des pouvoirs publics, l’association Visarte se leva pour exprimer son souhait de voir promus des artistes vivants. Et ceux-ci ne manquent pas sur la scène suisse, preuve en est cette compilation provenant d’une soixantaine de dessinateurs, parvenue jusqu’au bord de Loire.
Disposés sur de grandes planches, sous verres, les crayonnages démontrent l’extrême variété du domaine du dessin. L’acte que nous avons tous pratiqué enfants, prend des formes inattendues. Du classique au novateur, du figuratif à l’abstrait, il se déploie en utilisant des techniques variées. Mine de plomb, fusain, pastel, aquarelle, stylo, plume, feutre, fil, encre de Chine, trous…autant de moyens de s’exprimer sur du papier.
Lors de ce parcours posé à même le sol, mes chaussures se sont souvent arrêtées pour mieux déguster l’étendue des talents en place. Parmi eux, restent particulièrement en mémoire les incroyables paysages de Richard Aeschlimann dont le trait charbonneux saisit à merveille les reliefs de la nature. Dans un registre totalement opposé, Jacqueline Benz trace des lignes par des points de feutre ou des croix. Une simplicité aussi déconcertante qu’efficace, à la fois graphique et militante.
L’attention se fige également sur deux œuvres abstraites féminines. Lorna Bornand utilise l’une de ses couleurs favorites pour nous aspirer dans un mouvant tourbillon de rouge, alors que Virginie Jacquier livre une pièce au relief aussi saisissant qu’élégant.
Enfin, un coup de cœur pour la démarche de Frédéric Clot dont les pointillés, que l’on imagine percés par une aiguille, créent des vides dont l’assemblage constitue une œuvre précieuse.
Fragments de l’inachevé
Lieu Unique à Nantes
Du mardi au samedi de 14h à 19h
Entrée libre
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